Improvisation au piano : se reconnecter à son instrument !

Improvisation au piano : se reconnecter à son instrument !

Un retour en force de l’improvisation au piano !

Une pratique aussi ancienne que l’avènement de la musique, l’improvisation musicale a longtemps été la seule forme d’expression musicale : on improvise depuis toujours et on a continué d’improviser même à partir de musique écrite.

Puis dès que l’édition musicale s’est « industrialisée » au XIXème siècle, la pratique de l’improvisation commence à se perdre. Le musicien ne devenait plus qu’un bon petit soldat capable de jouer à la note près les musiques d’un compositeur.

Le retour de « l’impro » se fait par le jazz d’abord, au début du XXème siècle, puis grâce aux musiques du monde de plus en plus présentes à nos oreilles occidentales depuis une trentaine d’années. Ainsi, elle fait son grand retour dans les Ecoles de musique et les Conservatoires.

Partition du moyen âge

On improvisait sur le chant grégorien dans les modes dits ecclésiastiques copiés sur des manuscrits à partir du IXème siècle, lors des offices liturgiques.

On improvisait en musique baroque en « brodant » sur des notes données et en réalisant les basses chiffrées. La basse n’était composée que d’une note et d’un chiffrage et le claveciniste en faisait (réalisait) des accords.

Dans la période classique, à l’époque de Mozart, on improvisait encore. Il y avait même des duels d’improvisation. Mozart et Clémenti se sont ainsi affrontés musicalement en 1781 !  Les concertos contenaient une part d’improvisation dans ce qu’on appelle les cadences, quelques minutes de musique jouées en solo.

Les romantiques, au XIXème siècle, continuaient d’improviser et c’était une discipline obligatoire enseignée dans les Académies. Liszt était un grand improvisateur ainsi que Chopin !

L’édition musicale fait disparaître l’improvisation

C’est vers 1830 que l’édition musicale (la musique imprimée) se développe. Auparavant, les élèves avaient plusieurs cours par semaine. D’ailleurs, avec certains professeurs, l’élève n’avait même pas le droit de travailler en dehors du contrôle du maître. Cela pour ne pas « détruire » le travail qui avait été fait lors de la leçon !

Puis les partitions rendant les élèves plus autonomes, le nombre de cours a diminué. Le professeur n’était plus là pour montrer à l’élève ce qu’il fallait jouer et lui proposer des « passages » à travailler. C’était à lui de s’entraîner à jouer ce qui se trouvait sur la partition. Celles-ci devenaient de plus en plus compliquées techniquement et l’élève-musicien avait de moins en moins de temps à passer sur l’improvisation.

L’improvisation revient dans les conservatoires

adolescents-au-piano-quatre-mains

Beaucoup d’Ecoles remettent l’improvisation à l’honneur. Celle-ci s’installe d’abord dans les classes de jazz, de musiques actuelles et de musiques du monde. C’est par là qu’elle arrive dans les classes d’instruments plus « classiques » tels que piano, violon, flûte ou violoncelle.

Malheureusement, bien que la volonté de compléter la formation des musiciens soit là, les moyens pour réformer l’enseignement musical permettent juste un « saupoudrage » et l’improvisation ne devient souvent qu’une option facultative.

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Les classes d’orgue, quant à elles, n’ont jamais délaissé cette discipline. Pourquoi ? Car l’orgue est l’instrument liturgique par excellence. Il introduit les cantiques et donne le ton à l’assemblée. Des improvisations méditatives prolongent les psaumes, accompagnent des déplacements pour ne pas rompre l’action liturgique. La musique est comme une huile dans les rouages de la liturgie souvent catholique romaine.

l'improvisation à l'orgue

Les pianistes sont finalement les musiciens les moins improvisateurs

Dommage ! Car, finalement, le piano est l’instrument que l’on trouve le plus souvent dans les lieux publics, chez des amis, dans les hôtels. Et c’est là que le pianiste classique frémit en redoutant le « allez, joue-nous quelque chose!! » Lui qui déchiffre si bien, qui monte ses gammes si régulières et fait virevolter ses mains sur les arpèges… de plus il n’a justement plus de pièce assez aboutie à présenter… L’improvisation aurait pu lui éviter de se trouver ce jour-là comme une poule devant un couteau !

Cette situation inconfortable incite le pianiste classique à se mettre à inventer, à se détacher de la partition. Surtout quand il voit que certains qui n’ont même jamais pris un seul cours de piano  arrivent à enchaîner brillamment les standards de jazz !

Je viens de trouver une vidéo, plusieurs semaines après la rédaction de cet article, de Jean-François ZYGEL, grand improvisateur français (et conteur) qui raconte mieux que moi tout ce que je dis dans cet article ! Il est professeur d’improvisation au CNSMD de Paris. Quelle limpidité !

Que développe la pratique de l’improvisation au piano ?

  • La solitude du pianiste est brisée : il peut improviser en groupe, développer l’écoute, se sentir porté, stimulé par le groupe.
  • Le pianiste est plus concentré sur son jeu qui peut devenir ainsi plus expressif. Il a plus la sensation de s’exprimer de façon personnelle sans avoir à répliquer un texte imaginé par un autre. Son improvisation est l’expression de ses propres émotions.
  • S’il n’a pas la maîtrise de la théorie, de l’harmonie ou du rythme, le pianiste débutant peut très vite improviser librement, c’est-à-dire sans avoir à respecter les règles qui régissent la « musique savante ». Son improvisation s’apparente alors à une esthétique contemporaine faite de timbres, d’intensités, de tempi variés. Il développe son écoute et sa créativité (faculté à trouver des solutions encore non explorées et de s’adapter à la réalité du « terrain »).
  • La technique pianistique peut mieux se développer chez les plus jeunes et se consolider. Sans la partition « entre le cerveau et les doigts », le corps est davantage connecté à l’instrument. Le pianiste joue AVEC le piano sur tout l’ensemble du clavier.
  • Chez l’élève bloqué par le trac, l’improvisation est la possibilité de se libérer de la partition, de jouer en public sans avoir la hantise du trou de mémoire.

Comment le professeur de piano intègre-t-il l’improvisation dans ses cours ?

D’abord, il lui est sûrement difficile de faire faire de l’improvisation si le cours ne dure que 30 minutes !

  • Si les conditions sont réunies, il peut en faire faire 10 minutes par cours, d’abord sur la gamme pentatonique, les touches noires pour les plus jeunes.
  • Puis commencer par les modes constitués uniquement des touches blanches (de RE, de LA…). Ces modes qui répondent aux doux noms de ionien, dorien, phrygien, lydien, mixolydien (mon préféré!), éolien, et locrien ! Notre gamme Majeure correspond au mode ionien. Tous ces modes sont transposables mais pour commencer, on reste sur les touches blanches ! Et on ne parle pas forcément de ces noms savants aux élèves sauf si ça les amuse !
  • On peut faire de l‘improvisation libre à partir de réservoirs de notes dans lesquels on puise les notes à jouer  ou totalement libre sans contraintes.
  • Puis, pourquoi ne pas reprendre ce qu’on appelle de plus en plus les 4 accords magiques ? Cela demande une bonne compréhension de la théorie musicale. Là, on commence à devoir anticiper, réfléchir aux enchaînements acceptables à l’oreille entraînée voire conditionnée !
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Accords construits à partir de la… (exemple pris à partir de la gamme de Do majeur)

Tonique,  sur le Ier degré de la gamme : DO, MI, SOL

Sous-dominante sur le IVème degré : FA, LA, DO

Dominante sur le Vème degré : SOL, SI, RE

Sus-dominante sur le VIème degré (ou relative mineure) : LA, DO, MI

…Et leurs renversements pour éviter trop de déplacements.

Après une interruption de plus d’une centaine d’années, les cours d’improvisation reviennent dans les institutions et jusque dans les CNSMD, Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse (situés à LYON et PARIS).

Dans les Ecole de musique, on peut y voir aussi une alternative à la lecture des partitions qui est de plus en plus difficile pour nombre d’élèves par manque de régularité dans l’entraînement à la lecture de notes. Mais penser ainsi ne résout pas le problème du solfège et les progrès en improvisation seront vite stoppés par le manque d’acquis théoriques !

L’improvisation peut sembler simple au début mais demande un entraînement journalier qui peut devenir un vrai plaisir et compter comme un échauffement, une première prise de contact avec l’instrument avant le travail du répertoire.

On se rend vite compte que l’improvisation est presque un jeu de stratégie : elle ne s’improvise pas ! : )

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